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  • Photo du rédacteurM&S Brichart

Myanmar #1 - Joyeux Noël et bonne année !

Du 19 au 30 décembre



Malgré un petit pincement au cœur au moment de décoller d’Inde après six belles semaines, sitôt posé le pied sur le sol birman à Yangoun, on est tellement choqué de retrouver de l’espace, du calme et surtout de la propreté, qu’on se dit que finalement on est pas si mal ici aussi. Yangon est la ville la plus importante du Myanmar, toujours appelé Birmanie par les français. En fait le nom a été changé en 1989 par la junte militaire au pouvoir de 1962 à 2011 dans un souci de rupture avec le passé colonial britannique. Décidemment. Autre évènement notable, une nouvelle capitale politique plus centrale, Naypyidaw, est sortie de terre en 2005 et fait plutôt office de ville fantôme en réalité. Néanmoins, elle nous rappelle au bon souvenir d’un pouvoir autoritaire bien décidé à contrôler plus efficacement son territoire.


A notre arrivée, nous ressentons plus particulièrement le fait que nous mettons les pieds dans un pays où la vie politique est extrêmement trouble. Alors que dans d’autres pays nous prenions souvent connaissance des problématiques sur place, le fait que le Myanmar ou Birmanie soit davantage médiatisé en France nous a quelque peu conditionné. Gage à nous d’essayer de creuser tout ça malgré notre posture biaisée de touristes en vadrouille au pays du sourire.



Yangon, changement radical de décor


Il ne nous faut pas longtemps pour nous sentir à l’aise à Yangon. Les gens sont d’une extrême bienveillance, très doux et souriant. Les rues sont calmes et hyper propres, les voitures roulent à une allure raisonnable en suivant leur ligne et cerise sur le gâteau, personne ne klaxonne malgré un trafic très intense. C’est le jour et la nuit par rapport à l’Inde. Bon par contre ils roulent à droite alors que le volant est lui aussi à droite. Soit, personne n’est parfait.


Notre halte à Yangon est rapide, juste le temps de s’imprégner un peu de notre terre d’accueil pour les 4 prochaines semaines et d’aller visiter l’incroyable pagode Shwedagon, un ensemble de temples bouddhistes concentrés dans une même enceinte. C’est la plus grande et la plus impressionnante du pays. Elle recèle en son centre un magnifique stûpa qui culmine à 98m de haut et est recouvert intégralement d’or. Pas de chance pour nous, la partie supérieure est cachée par un gigantesque échafaudage de bambous. Entre le sol marbré blanc, les dorures et les mosaïques de miroirs, on est complètement éblouis. Plusieurs édifices nous évoquent les temples chinois avec leurs toits arque boutés et en escaliers et dont les extrémités en bois sont sculptées. A l’intérieur, on trouve des statues de Bouddhas dorés, des fresques, des fleurs, etc., c’est assez chargé mais superbe. Belle démonstration de raffinement de l’art birman.

En famille ou en solo, les birmans viennent ici se recueillir discrètement, suivre des sessions d’enseignements avec un moine ou bien simplement se poser un peu. L’ambiance est à la fois recueillie et décontractée et nous donne un aperçu de l’importance de la religion dans le pays. En réalité, le pays regorge de temples et de monastères bouddhistes, depuis les coins les plus isolés jusque sur les ronds-points des grandes villes, partout des édifices dorées pointent vers le ciel. La grande majorité sont dans un état quasi parfait, les bouddhistes prennant un soin méticuleux de leurs lieux de culte puisque cela fait partie intégrante de la vie de chacun. On essayera d’en toucher un mot dans un second article.

Kalaw, Noël chez les Birmans


On avait presque oublié que l’on pouvait voyager assez confortablement depuis le début de notre chapitre asiatique. Pour nous rendre à Kalaw (prononcez Kalô), petite cité installée dans les montagnes du centre du pays dans l’état Shan, nous empruntons un bus de nuit plutôt confort, avec place pour les jambes et sièges semi-inclinable. Bonheur. L’ensemble du pays est relié par un réseau de bus bien fichu, le train faisant encore défaut avec des trajets à rallonge et des infrastructures vieillissantes. Côté moins pratique, le bus nous dépose à Kalaw à 4h du mat, dans le froid et dans une ville complètement éteinte. On se motive pour faire les derniers kilomètres à pied vers notre auberge aidés de nos lampes torches et sous l’œil méfiant des chiens errants au bord du chemin. Ces quelques jours à Kalaw nous font apprécier pleinement l’hospitalité et la gentillesse birmane qui sont tout sauf des mythes.

L’environnement de Kalaw et très verdoyant avec ses petites montagnes, ses bois de pins et ses cultures diverses et variées. Plusieurs chemins et sentiers permettent se s’enfoncer plus profondément dans la campagne en passant par des villages loin de tout où vivent différentes ethnies que l’on distingue pas leurs habits traditionnels et leurs dialectes spécifiques. En se promenant on croise des dizaines de paysans, hommes et femmes affairés dans les champs, travaillant uniquement à la force de leurs bras. On est frappé de voir à quel point le Myanmar est resté rural. A chaque fois des bonjours, des sourires ou de simple saluts de la main. L’un des paysans nous invite à se servir dans ses mandariniers. Dans les villages, les enfants nous courent après pour nous taper la main ou nous donner des fleurs. C’est un vrai film ! On est très touché par cette bienveillance ambiante. Il semblerait qu’ici les gens soient encore heureux de rencontrer des étrangers et de communiquer avec eux. Pourvu que ça dure.



On retrouve les fruits et légumes croisés lors de nos randos sur les étals bricolés et colorés des marchés de Aung Ban et Kalaw. On déambule dans les allées où l’on ne se lasse pas d’observer les stands et les vendeurs, surtout vendeuses. Les marchés sont imprégnés de l’odeur très forte de poissons séchés que l’on retrouve en masse sur de nombreux étals. Les birmans en raffolent notamment dans des soupes. Surprises gustatives garanties. Les poissons frais sont découpés et écaillés sur place et occupent les mêmes étals que les poulets et les mouches... On ne se risque pas à tester la viande fraiche, en revanche on fait quelques découvertes, comme cette pate collante de riz un peu sucrée mais sans grande saveur, une confiserie locale très appréciée. On se régale aussi d’énormes pamplemousses, plus gros que nos têtes et pas facile à peler tant leur peau est épaisse et dure, au moins 4 ou 5 centimètres. Clémentines juteuses, pastèques géantes et savoureuses, avocats fondants s’achètent pour pas grand-chose aux côtés de quantité de céréales, de légumes et de breloques de la vie quotidienne.

Le marché local c’est aussi un point de convergence des ethnies locales qui descendent des montagnes environnantes. En général on les distingue par la couleur et le motif du fichu qu’ils se nouent sur la tête ou par la couleur de leur tunique. Les différentes ethnies qui peuplent le Myanmar se révèlent être une source de richesse culturelle pour le pays mais aussi un défit pour l’unification du territoire que recherche le pouvoir politique depuis l’indépendance en 1948.

Ce fut le général Aung San, personnage hautement vénéré au Myanmar et père de la Dame de Rangoun, Aung San Suu Kyi, qui fut le premier à tenter un rapprochement politique des différentes ethnies du pays. Il parvint même à un accord préalable avant de se faire assassiner en 1947. Depuis la junte militaire règne sans partage écrasant les différentes minorités aux revendications autonomistes ou indépendantistes. Les shans, les karens, les môns, les kachins ou encore les rakhines sont les groupes les plus importants. Certains d’entre eux disposent même d’armées qui à défaut d’avoir été vaincues sont tolérées par le pouvoir. Plusieurs conflits traversent donc régulièrement le Myanmar et paralysent des régions entières. Les rebelles sont entretenus par les géants voisins, la Chine en première place, et les diasporas. L’ouverture récente du pays à une pseudo démocratie et une économie de marché masque bien des problèmes nationaux qui sont compliqués à dénouer. Les militaires ont profité de cette période de changement pour faire main basse sur toutes les grosses entreprises nationales et les richesses naturelles avec une politique de privatisation extraordinaire. Ils se sont également assurés 25% des sièges du parlement et le contrôle des ministères régaliens en modifiant la Constitution. C’est donc dans ce climat délicat que Aung San Suu Kyi doit composer et restaurer la paix dans le pays. La crise des Rohingas qui perdure depuis des décennies illustre bien les difficultés de l’Etat à pacifier les régions où les tensions sont fortes. Impossible d’aborder le sujet pour le moment avec des locaux.


Arrive tranquillement le jour de Noël à Kalaw, où vit une petite communauté chrétienne, raison pour laquelle nous nous y sommes attardés. Le pays étant à 90% bouddhiste, Kalaw est l’un des rares endroits où l’on trouve des chrétiens et des musulmans. Loin de nos familles, nous tenons à assister tous les deux à la messe de minuit. On nous indique un orphelinat catholique pouvant nous renseigner sur le lieu et l’heure de la messe. Une sœur nous y accueille au milieu des enfants, nous propose de manger avec eux et nous donne rendez-vous plus tard le soir pour aller ensemble à l’église située à quelques kilomètres.

A 22h30, nous les rejoignons et faisons route avec quelques jeunes bénévoles très gentils qui n’arrêtent pas de rigoler. On est très contents d’être avec eux. L’église est grande et recouverte à l’extérieur de guirlandes lumineuses. Ca donne au lieu un aspect féerique très joli et chaleureux. Sur le côté, des personnes préparent un pot pour plus tard pendant que les fidèles arrivent. On reste dehors dans le froid un moment à écouter les chants qui résonnent dans l’église. Quand on entre, on est étonnés de voir que toutes les femmes et filles ont la tête recouverte d’un fichu de dentelle blanche. Ca fait très méditerranéen. Les hommes, moins nombreux, se tiennent à droite de l’allée uniquement mais sont finalement rejoint par des femmes pour remplir les bancs. Après un chapelet de 30 minutes la messe commence enfin à minuit pile. Il ne fait pas très chaud dans l’église et on ne comprend pas un mot à ce qui est dit même si dans la forme c’est exactement comme chez nous. Les chants sont très beaux et entonnés par tous avec beaucoup d’entrain. L’esprit de Noël est bien là, au milieu de toutes ces personnes réunies. 1h30 plus tard, la messe est dite et on part saluer le prêtre avec les enfants de l’orphelinat qui gèlent sur place. Tous les fidèles apportent un petit quelque chose au vieux prêtre très sympathique qui nous tient la main vigoureusement. Si tôt fait nous filons rejoindre nos pénates, fatigués mais ravis.



De Kalaw au Lac Inlay


Le lendemain, nous partons avec un petit groupe pour un trek de 3 jours à destination du Lac Inle. Nous sommes guidés par Aki, une jeune birmane de 20 ans très dynamique, babacool et très ouverte sur le monde. Elle conduit des treks depuis qu’elle a 12 ans et connait le coin comme ça poche. Nous traversons pendant trois jours la campagne birmane profonde, authentique et magnifique où les paysages changent très vite. Ce trek est très connu des touristes mais Aki qui est un peu plus maline que les autres guides, nous propose des chemins très peu fréquentés où l’on fait de belles rencontres. Le premier jour, une vieille dame, au détour d’un chemin, nous invite à prendre le thé chez elle. Elle ouvre sa modeste maison à nos yeux curieux et nous raconte un peu sa vie. Elle a 5 fils à marier et serait bien heureuse de trouver des belles-filles dans notre groupe! Trop mignonne. Nous finissons dans le jardin à cueillir des fruits avec elle et son mari. Trop gentils.



Les petits villages ou hameaux que nous traversons sont très pauvres mais les gens affichent cet éternel sourire de contentement et de joie. Les maisons sont pour la plupart faites en bois pour la structure et les murs de parois de lamelles de bambou tressées, le rez-de-chaussée servant de boutique, de débarras ou d’abris pour les bêtes et l’étage constituant la pièce à coucher collective. Il n’y a aucun superflu et presque aucun ameublement. Vieillards et jeunes enfants trainent dans les ruelles pendants que les parents travaillent aux champs. Ici on ne vit que de l’agriculture et de l’élevage. Cet univers nous catapulte des décennies en arrière, époque où les machines n’existaient pas. On réalise à quel point l’ouverture du pays sur le monde est récente et surtout à quel point une large partie de sa population n’a pas accès à la modernité. Pas d’électricité, pas d’eau courante dans les maisons, pas de téléphones. L’ancien monde.



Chemin faisant, notre petit groupe très animé en apprend un peu plus sur la culture birmane. Aki nous éclaire sur plein de choses comme la place de l’homme et de la femme dans la société et dans la famille, sur la religion, sur le système éducatif ou sur les mythes et légendes de la région. L’ambiance est au rendez-vous. Le matin du 2ème jour nous passons aux abords d’un village dans lequel se déroule un mariage. Aki, nous y conduit directement et nous prenons place parmi les invités très naturellement. Au Myanmar, tout le monde est convié aux festivités qui dure du matin jusqu’en milieu d’après-midi. Sous de grandes tentes, des dizaines de tables et de tapis sont installés autour desquels prennent place les invités auxquels on sert un délicieux repas. Ce sont les villageois et les amis de la famille qui font le service. On n’est constamment resservi et c’est un régal, surtout le porc mijoté avec de gros morceaux de couenne. Nous allons ensuite saluer les mariés, habillés tout en rose, et nous dirigeons vers la maison des parents pour prendre le thé et par la même occasion faire une petite donation au jeune ménage. Là aussi il y a de l’ambiance. Ca bavarde en fumant de gros cigare ou en mâchonnant du bétel. On prend une place folle mais une fois de plus on nous accueille avec un réel plaisir. On est bien loin de nos mariages sur liste !


Nous passons les nuits chez l’habitant, où l’on dort à la dure mais où l’on goûte là aussi à une délicieuse cuisine birmane composée de dizaines de petits plats, currys de légumes, salades de thé, aubergines fondantes et on en passe, le tout accompagné de riz bien entendu. On conclut ce super trek sur les rives du lac Inle, dont on aperçoit déjà les jardins et villages flottants.



Le Lac Inlay, une beauté fragilisée


Le lac Inle n’est pas un lac comme les autres puisque c’est toute une vie qui s’est développée autour et sur lui. Entouré de montagnes, très allongé, le lac offre des paysages absolument magnifiques surtout le soir dans la lumière rougeoyante. Nous naviguons dessus à bord d’une pirogue pendant une journée avec Wolgang et Gasmine rencontrés pendant le trek. Notre jeune conducteur nous conduit aux différents lieux que nous lui avons indiqué et nous fait passer à travers les villages et jardins flottants disséminés sur le lac aux eaux peu profondes. Bien sûr on rencontre de nombreux pêcheurs en action, dont la technique est unique en son genre et a fait leur réputation. Mais pas que ! On est étonnés de voir à quel point les activités se sont diversifiées et durablement installées ici. Des ateliers de textiles, d’argenterie, des ferronneries, des fabriques de cigares organisent et quadrillent le lac en différents secteurs et villages. Toutes et tous se trouvent dans des maisons de bois traditionnelles sur pilotis auxquelles on accède uniquement par pirogue.



C’est un balais incessant qui se déroule devant nos yeux, les longues pirogues se croisant à des carrefours entre les allées de maisons ou au milieu de l’eau. Comme sur terre, les villages ont leurs écoles et leurs temples, on pourrait croire à un épisode d’inondation, mais pas du tout, c’est simplement un lac habité. De grandes zones sont recouvertes de jardins flottants, où les paysans travaillent depuis leurs pirogues pour récolter les tomates entre autre ou veiller à l’entretien des structures en bambous. Cet endroit aurait des allures de contes de fée si le tourisme, l’artisanat et l’agriculture tous trois polluants ne venaient pas entamer les fondations de cet écosystème aquatique fragile. Entre développement économique et préservation écologique, pour le moment le premier prend l’avantage.



Le jour suivant, nous pédalons d’un bout à l’autre du lac pour rejoindre In Dein, un village connu pour son passage couvert de plus de 600 mètres de long qui mène à un ensemble de pagodes très ancien. Le lieu est très joli, mais une fois de plus, le plus sympa reste de parcourir les chemins à travers rizières et champs où la récolte de canne à sucre bat son plein.

Une première quinzaine géniale.


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