Guatemala #3 - Treks Xela - Atitlan et Acatenango
- M&S Brichart
- 29 juin 2018
- 9 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 oct. 2018
Pour ce dernier article sur le Guatemala, nous concluons en beauté par le récit de deux treks qui nous laissent un souvenir assez magique, l’un ayant eu lieu mi-mai et l’autre début juin.
Le premier de 3 jours, nous a fait traversé une multitude de paysages et de climats dans un isolement presque complet, le second, sur 2 jours, nous a offert un show spectaculaire, le volcan hyper actif El Fuego, littéralement en feu. C’est toute la splendeur du Guatemala que nous avons de nouveau pu admirer, sac sur le dos et grosses chaussures aux pieds.

Trek 1 : Xela – Atitlan avec l’association Quetzaltrekkers
Pour ce premier trek que nous réalisons avec Marie B, notre comparse pour encore quelques jours, nous prenons part à un groupe multiculturel chapoté par l’association Quetzaltrekkers. Cette asso, vieille d’une vingtaine d’années ne vit que grâce à l’engagement de volontaires venus du monde entier pour superviser ces treks et ce durant des mois. L’ensemble des bénéfices servent à financer une école pour enfants des rues dans la région de Quetzaltenango (Xela). L’asso propose plusieurs treks mais nous posons notre dévolu sur un trek de trois jours qui relie Xela, la 2ème ville du pays et le Lac Atitlan, notre « sweet home » pendant ces 3 mois de volontariat. Ce trek de 50 km environ traverse une région montagneuse, le Haut Plateau, via des petits sentiers empruntés par les agriculteurs du coin. Ici, les gens parlent le Quiche, dialecte cousin du Kakchiquel.
Les volontaires de l’asso nous donnent RDV la veille du départ pour un rapide brief sur le parcours et pour partager les denrées. Nous porterons une partie des vivres et du matériel dans nos sac à dos. Du matos de camping est à disposition pour ceux qui ne sont pas équipés. Cette rencontre permet également de faire connaissance avec nos futurs compagnons de route. Nous formons un gros groupe, c’est pas forcément l’idéal mais il faudra faire avec.
Rendez-vous est donné à 6h le lendemain matin dans les locaux de l’asso. La tête encore un peu dans le gaz, et après avoir partagés un gros petit déjeuner, nous levons le camp tous ensemble, nos gros sacs sur le dos pour une traversée à pied de Xela. Au bout d’une vingtaine de minutes, nous rejoignons un chicken bus, dont nous remplissons rapidement les banquettes. Une grosse heure plus tard, après avoir emprunté des petites routes qui montent, le bus nous dépose dans un petit village paumé, point de départ du trek. Le staff lance une petite animation pour que nous puissions enregistrer les noms des 24 participants, majoritairement anglo saxons. Nous sommes les trois frenchies au milieu d’Américains, de Canadiens, d’Anglais, d’Irlandais, d’Australiens, de Sud Africains et de quelques Flamands et Néerlandais. Zéro locaux, tout se fait en anglais, mais l’ambiance est au beau fixe. L’un de nos comparses est affligé d’une belle tourista, la première journée risque d’être un peu longue pour lui. Et il faut dire que ça commence assez fort. Les 3 premières heures ne sont que montée, raide et glissante. Les chemins sont étroits et rarement en lacets comme on en connait chez nous, et le poids de nos sacs n’arrange rien. Il faut donc compter sur de bons mollets et sur un souffle à toute épreuve. Simon nous couve une belle bactérie intestinale et personnellement j’ai un rhume bien installé. Marie nous met donc la pépite et caracole en tête.
Au fur et à mesure que nous avançons, les paysages se transforment et le temps change. Nous alternons forêts denses et plaines dégagées, matinées ensoleillées et après-midis nuageux et pluvieux. La saison des pluies est bien amorcée. En certains endroits la terre fume et dégage une chaleur impressionnante qui trahit le caractère volcanique de la région. En d’autres endroits, nous surplombons les nuages depuis les chemins de crêtes escarpées. Nous rencontrons souvent des hommes et leurs ânes qui transportent des lourds fagots de bois ou cultivent des petites parcelles de terre. Armés de leur machette, ils arpentent les montagnes à longueur de journée.
Les jambes déjà lourdes et les épaules endolories nous arrivons sur les coups de 17h dans un petit village aux allures fantomatiques. Le brouillard a envahit les rues où peu de personnes s’aventurent et la plupart des commerces sont fermés. On a un peu l’impression d’être des extra terrestres. Deux petits bonhommes, vraiment tous petits, nous ouvrent la salle municipale pour la nuit. Chaque semaine, le trek passe par là, ils ont donc l’habitude d’accueillir des marcheurs. Cela fait d’ailleurs vivre pas mal de monde ici puisque à peine arrivés certains vont s’acheter quelques gourmandises et bières pour trinquer ensemble mais surtout tout le monde expérimente le temascal, le sauna maya, en guise de douche. Une famille du village met à disposition en échange de quelques quetzals 3 temascal, sorte de petite cahute de bois ou en brique, de 2m², dans laquelle on s’introduit en s’accroupissant. Le confort y est très rudimentaire mais surtout, il y règne une chaleur abrutissante, générée par le feu de bois installé dans un coin. Pour faire nos ablutions, nous disposons de 3 sauts, un d’eau chaude, disposé sur le feu, un d’eau froide et un dernier dans lequel nous faisons notre mélange à la température désirée.
Le temascal fait partie intégrante de la culture indigène. Il existe des cérémonies spéciales animées par un chaman qui suivent un rituel bien établit. En tout cas, après 15 min on se sent régénérés et délassés. C’est génial et très particulier à la fois. Nos compagnons à Santa Catarina sont coutumiers du temascal et l’utilisent au moins une fois par semaine.
Levés de bon matin le jour suivant, nous marchons une bonne partie de la journée sous la pluie ce qui en devient un peu éprouvant à force. De nouveau, certains passages nous cassent les jambes et réveillent nos muscles douloureux. Nous traversons quelques villages isolés et pauvres. Comme la veilles, nos guides nous font un topo sur le coin et sa spécificité. Ici , ils nous font remarquer le nombre important de maisons toutes neuves mais vides et d’une architecture à la « californienne » qui dénotent fortement avec les maisons traditionnelles en terre ou en bois. Ce sont en fait les propriétés de guatémaltèques expatriés aux USA et qui aident financièrement le village. Ici, le rêve américain est encore très prégnant. Beaucoup tentent leur chance, mais la plupart se cassent les dents et perdent toutes leurs économies en une seule tentative qui peut couter jusqu’à 5000 dollars. C’est une situation très critique qui laisse transparaitre la misère et le désespoir de la population, prête à tout pour avoir une vie meilleure.
Nous arrivons bien trempés le soir chez Don Pedro et sa famille qui nous accueille pour la nuit. Aux petits oignons avec ses nombreux hôtes, nous reprenons des forces et nous réchauffons autour du feu. Le repas du soir finit de nous remettre sur pied mais nous ne tardons pas à nous allonger sur nos tapis de sol après avoir fait griller quelques chamallows et joués avec les châtons.
Notre dernière journée de rando commence tôt, très tôt. 3h30, nous enfilons nos vêtements et rangeons nos affaires rapidement pour partir dar dar afin de profiter du lever du soleil sur le Lac Atitlan. Vers 5h du matin, alors qu’il fait encore nuit, nous arrivons à destination, un champ avec une vue panoramique sur le lac. Malheureusement, les nuages sont eux aussi de la partie. C’est donc à un demi lever de soleil que nous assistons en petit déjeunant. Peu à peu les nuages se dissipent et le soleil commence à taper. Nous entamons la descente vers le lac sous un ciel bleu et avec escorte policière, ce tronçon étant réputé sensible… Bon, soit. Après 3 jours coupés du monde, loin de tout, notre groupe se dit au revoir. Tout le monde semble avoir apprécié cette expérience physique et humaine dans un Guatemala loin des sentiers battus à la fois reculé et pauvre mais vachement authentique.

Trek 2 : L’ascencion de l’Acatenango, le show du Fuego
C’est probablement le must du Guatemala. S’il devait y avoir un seul incontournable ce serait celui là, en tout cas selon nous.
Vivement recommandé par pas mal de voyageurs rencontrés sur notre route, nous avons décidé de conclure notre séjour au Guatemala par l’ascension de l’Acatenango, un volcan endormi, voisin direct de El Fuego, un volcan très très actif. Lors de nos précédents passages à Antigua, située à 15 km du volcan nous avions déjà pu entendre les déflagrations quotidiennes du géant et surtout voir les gros nuages de cendres volcaniques sortir du cratère et dériver dans le ciel. L’Acatenango fait face au Fuego et offre donc un emplacement de choix pour assister aux éruptions continues du Fuego, particulièrement à la nuit tombée. Nous avons donc opté pour une excursion de 2 jours avec nuit sous tente sur l’Acatenango.
Il est possible de le faire seul, mais c’est pas hyper recommandé car la rando est dure et surtout les conditions sont pas forcément clémentes. Il y a 2 ans, 6 personnes sont mortes de froid après s’être perdues dans la nuit. Et puis avec ce qui s’est passé dernièrement ça n’est pas complètement infondé. N’ayant pas de tente, nous avons donc choisi de partir avec une agence en compagnie de 6 autres personnes et de notre guide Jeremias, un gars du village. Notre petite équipe, fort sympathique s’est donc lancée sur les pentes très raides et friables de l’Acatenango le vendredi 1er juin au matin. L’ascension est plutôt sportive et se fait majoritairement à couvert d’une forêt. Bien que moins chargés que sur le trek précédent, il faut faire un bel effort surtout que le temps n’est pas fantastique. Une partie du groupe n’a pas la condition physique et le matériel pour aborder la marche dans les meilleurs auspices. On se rappelle surtout Nao, un japonais chaussé de stan smith et habillé en tenue de ville pas du tout adaptée pour la rando et transportant son peu d’affaires dans un sac en plastique. Il finira complètement trempé et avec une semelle en moins, mais le moral lui est toujours là. Un sketch.
Finalement, et dans l’effort jusqu’au bout, on arrive à notre camp de base, où nous filons nous abriter sous une bâche car la pluie commence à tomber très fort. Serrés les uns aux autres, nous allumons un feu pour nous sécher et nous réchauffer. Nous plaisantons autour de notre situation plutôt misérable, coincés sous cette minuscule bâche, asphyxiés par la fumée et pris dans un orage extraordinaire. Les éclairs déchirent le ciel. On ne sait plus qui du Fuego ou du tonnerre fait le plus de bruit. C’est insensé. Pendant 2 bonnes heures nous n'avons aucune visibilité sur le volcan mais à mesure que la nuit tombe, les nuages disparaissent. Chacun sort son petit trésor pour le partager avec tous, Shaun agrémente notre chocolat chaud d’un peu de rhum, les deux québécois nous gâtent de tartines beurre de cacahuète/confiture (…) et nous en profitons pour sortir notre ultime saucisson. La fête commence. Et pour compléter ce tableau pittoresque, le Fuego entame son spectacle qui durera toute la nuit, avec une montée en puissance sur les coups de 21h. C’est à couper le souffle. On est comme assommés par tant d’intensité, et ça ne s’arrête plus, pire c’est de plus en plus fort. La lave est projetée à des dizaines de mètres, peut-être des centaines au dessus du volcan et dégringole sur ses flancs à pic. Le bruit est assourdissant, on a l’impression d’être sur le tarmac de Charles de Gaulle. L’écho produit par la chute des roches sur la montagne ajoute encore un peu à l’aspect apocalyptique des éruptions. Les Oh, les Ah, les Whaaat, vont bon train. La surprise et la joie sont générales. On hallucine tout simplement. En dessous de nous, les lumières des villes et villages scintillent. Au loin Guatemala Ciudad rougeoie. Merveille.
Le lendemain matin, alors que certains restent au camp de base pour le lever du soleil, certains se jettent à l’assaut des derniers mètres très pentus de l’Acatenango pour assister au même spectacle mais depuis le sommet. On se croirait sur Mars, ou sur la Lune et juste là le Fuego qui continue de cracher. Décidemment il nous gâte. On a mis des vidéos sur youtube que vous pouvez trouver dans les petits plus. Elles ne reflètent qu’en partie l’intensité du truc mais c’est déjà pas mal.
La descente est plus rapide. On a tous la banane bien que la nuit ait été courte et fraiche. Arrivés en bas, nous reprenons notre petit bus pour Antigua, nous sommes le samedi 2 juin.
La suite peut-être que vous la connaissez, le Fuego a connu un épisode particulièrement intense le dimanche matin qui a causé la mort de plus de deux cents personnes et au moins autant de blessés et de disparus. Les villages alentours ont été durement touchés et Antigua a été recouverte de cendres. Par chance nous avions quitter la ville à 8h du matin en direction du Nicaragua. On remercie notre petite étoile et bien sûr on pense fort aux victimes de cette tragédie.
C’est donc sur une touche assez spectaculaire que nous concluons notre séjour au Guatemala dont on repart le cœur chargé. On a envie de dire plein d’autres trucs, mais l’article est déjà suffisamment long et puis finalement ça peut tenir en quelques mots : le Guatemala c’est magique.
Pour les mélomanes, petite playlist de ces 3 mois et demi au Guatemala :
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